12/08/2012

De la solitude à l'indépendance

Ne pas écrire pendant longtemps c'est expérimenter un manque, mais il ne s'agit pas ici de mieux retrouver les mots. Pause estivale, vacances, ennuis d'ordinateur, manque d'imagination, lassitude... je ne sais pas; voilà.
Pourtant j'ai vu beaucoup de films, beaucoup de spectacles aussi et j'aurai sans doute pu écrire tout autant; j'ai pris des vacances globales.
Je pourrais aussi régler quelques comptes car la médiocrité de certains me désole toujours autant, mais je ne suis personne pour me permettre ce genre d'impudeur et quelque soit mon agacement je ne le ferai pas ici. 
Je suis partie en vacances toute seule pour la première fois de ma vie. J'ai décidé ça sur un coup de tête, deux semaines loin de tout et de tout le monde dans un endroit où pourtant ce n'est pas la solitude qui caractérisait les autres vacanciers. Dans une station balnéaire grecque sur l'île de Kos, j'ai adoré être en tête à tête avec moi même. J'ai adoré me reposer, ne pas compter, parler uniquement si j'en avais envie, lire, encore lire, nager, prendre du soleil et de la chaleur en stock pour les mois à venir et marcher sur la plage le soir en laissant mon imagination se nourrir du mouvement des vagues.
Devenir vaguement kitsch et aimer ça, voilà mon expérience estivale. 
Il a s'agit de choisir la solitude, elle ne me fut pas réellement imposée et c'est au moment du choix que j'ai saisi la portée personnelle de ce dernier. Effectivement, je peux choisir certaine choses importantes pour moi, j'en ai le droit et je l'avais trop souvent oublié. Car je me suis souvent plaint auprès de mes proches de cette solitude qui me pèse dans mon quotidien, qui elle n'est pas un choix fondamental, qui est un fait concret, un résultat des aléas de ma vie. Toutes mes conclusions me rapportent à elle, pour le moment en tout cas. J'ai donc décidé de l'apprivoiser et d'en faire mon atout, ma qualité, ma valeur. Ce n'est plus de solitude dont je parle, mais d'indépendance. Il m'aura fallu toutes ces années de vie pour l'aimer, l'aimer avec intensité. 
J'ai pu constater que cette décision est parfois difficile à comprendre pour les autres. En vacances par exemple où une jeune femme seule interroge ceux qui la voient passer. Pourtant être seule dans ce cadre c'est aussi accepter de payer un supplément pour une chambre d'hôtel, c'est occuper une table pour deux dans un restaurant bondé, s'allonger sur une chaise longue de plage sous un parasol réservé pour deux normalement, c'est accepter de répondre gentiment à celui qui vous aborde en vous demandant pourquoi vous avez l'air si triste ou pourquoi vous ne souriez pas.
Mais voilà, sourire à la ronde et à l'air ambiant, c'est aussi passer pour une folle, allez comprendre les réactions des gens. C'est aussi parfois accepter le dialogue et rencontrer des personnes intéressantes et agréables mais aussi devoir supporter l'effet de groupe autour de soi quand on ne le désire pas forcément.
Être seule en public c'est être comme un miroir pour les autres, quelque chose déplace les convenances. On se demande pourquoi, quel évènement vous a poussé à cette situation.
Et si le seul évènement est justement une simple décision? Les visages s'éclairent, les langues se délient, quel courage m'a t-on dit...
C'est absurde, et c'est cette absurdité qui rend l'expérience géniale. Elle permet d'enregistrer des images, des sensations, des mots, des regards, des attitudes; enregistrer ces pointes de vie pour les moments d'ennui à venir. Une liberté mentale totale. 
Dans l'éventualité de l'oubli, j'ai même poussé la chose jusqu'à m'envoyer une carte postale. Je me suis écrit quelques mots sur ce bout de carton souple pour pouvoir avoir un support de souvenir, pour que ces pensées soient toujours le témoin de cette expérience somme toute banale, mais qui fut très importante pour moi.
Elle n'est que le début des prochaines à venir, il s'agit d'une forme de bilan après un début d'année intense et riche.
Je savoure enfin l'indépendance que j'ai désiré si longtemps.
Et même si certains jours ma solitude me dérange comme un petit caillou dans la chaussure, je sais qu'à l'occasion je pourrai repartir sur cette île grecque ou ailleurs pour retrouver l'avantage de cette dernière.
Je m’apprête à reprendre le travail demain et je sais déjà que le repos pris ne fera effet que peu de temps, que mon arbre mental fera rapidement des siennes, qu'il faudra gérer ce quotidien, ces manques, ces illusions et mes contradictions. 
La vie est ce qu'on en fait, et en marchant sur cette plage, j'ai décidé que la mienne était formidable.